Le changement, dans les organisations, n’est plus une exception mais est devenu la norme. Chaque organisation, quelle que soit sa taille, son domaine d’activité, son environnement, y est confrontée. Le changement est un véritable bouleversement du système : il peut être répétitif, violent, multiple et a sans aucun doute un impact fort sur l’organisation et l’ensemble des acteurs qui la composent.
Il peut être générateur de stress. En effet, cela peut être assimilé à un processus de deuil, théorie développée par Elisabeth Kubler-Ross, psychiatre helvético-américaine, à la suite de ses observations dans les camps nazis lors de la seconde guerre mondiale.
Elle décrit ce phénomène en cinq phases :
- Déni : dans cette étape initiale, l’individu réagit au choc, à l’annonce ou à la survenance du changement profond. C’est souvent une phase courte dans laquelle s’exprime un rejet total, une incompréhension
- Colère : le déni n’étant plus possible, il laisse la place à la révolte. C’est une période de résistance au changement dans laquelle peur et chagrin ont du mal à s’exprimer. L’individu y criera à l’injustice, s’appliquera au sabotage.
- Marchandage : la colère étant inefficace, l’heure est à la négociation. L’individu face à son impuissance fait appel à plus haut que lui. L’idée est de gagner du temps par rapport à la mise en œuvre du changement, du choc.
- Dépression : c’est l’étape où la perte à venir est conscientisée par l’individu. Ce dernier se confronte à la réalité. Cela peut sembler interminable car les émotions ressenties sont extrêmement fortes (absence d’enthousiasme, désespoir, profonde tristesse…
- Acceptation : cette dernière phase est l’acceptation du changement. Il n’est plus subi mais intégré. Cette phase va permettre le rebond, l’individu va remettre son énergie au service de son futur.
Ce même phénomène a été observé dans un grand nombre d’entreprises lors de la période Covid, en réaction aux différents confinements et à leurs règles. Le système de valeurs étant au cœur du fonctionnement de l’organisation, l’impact a été multiplié en cas d’absence de connexion des collaborateurs aux valeurs de leur entreprise. Les conséquences d’un changement peuvent faire émerger de nouveaux besoins chez les collaborateurs et au sein de l’organisation même. Chez les salariés, ce changement peut générer le besoin de donner du sens à leurs nouvelles tâches, de trouver une nouvelle place au télétravail et donc de maintenir un équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle, de conserver la cohésion, le travail d’équipe malgré le distanciel.
Selon l’étude menée par Dares pour le gouvernement lors de la période Covid, 27% des salariés télétravaillent en janvier 2021 contre seulement 4% en 2019 et huit télétravailleurs sur dix souhaitent le maintenir. Sur le point de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, l’augmentation de 18% des reproches de l’entourage par rapport à l’avant-crise vient dégrader cet équilibre. Pour l’ensemble des salariés interrogés, la notion de « conflit de valeurs » a augmenté lors de cette période de bouleversement et quatre salariés sur dix ont soufferts d’isolement. Pour l’entreprise, cela peut impliquer l’accès pour tous à du matériel performant permettant le télétravail ou la modification de certains process pour garantir la sécurité, par exemple. Certaines entreprises ont d’ailleurs connu des difficultés à répondre à ces nouveaux besoins. Ainsi, la difficulté à donner un sens global à l’action de leur organisation a entrainé la perte de confiance des collaborateurs. Ils se sont questionnés sur leur place, leur rôle et sur comment l’entreprise prenait soin d’eux. L’absence de connexion aux valeurs, dans cet environnement, désaligne et impacte le niveau de motivation des équipes. En faisant ici le lien entre connexion aux valeurs et motivation, on envisage la motivation sous son aspect intrinsèque c’est-à-dire qu’elle consiste à être le propre moteur de son épanouissement, de sa satisfaction. L’un des facteurs essentiels de cette motivation intrinsèque est le sentiment d’appartenance, sentiment auquel participe fortement le système de valeurs. Ainsi, l’absence de motivation, dans cet environnement de crise, peut conduire à des phénomènes de souffrance au travail : un taux d’absentéisme croissant, des arrêts maladie pouvant aller jusqu’au burn-out (syndrome d’épuisement professionnel), au bore-out (syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui), au brown-out (perte de sens) ou en dernier recours la « great resignation » ou « grande démission ». Dans un article pour la BBC (British Broadcasting Corporation) , la journaliste Kate Morgan explique comment les entreprises à « la culture d’entreprise médiocre » ont poussé leurs salariés jusqu’au « point de rupture ». A l’inverse, certaines entreprises ont misé sur leurs valeurs : engagement, sécurité, équité solidarité pour accompagner, avec succès, leurs collaborateurs dans cette période trouble. Elles ont réussi à tenir bon en s’appuyant sur leurs valeurs lors de ce changement majeur mais il est clair que ce n’est pas le cas de toutes.
Il est donc intéressant de nous interroger sur l’autonomie des organisations à la gestion de ces environnements de crise. L’idée est que l’entreprise ait les cartes pour appréhender ces changements répétitifs et profonds, qu’elle soit armée et non dans l’obligation de répondre en réaction, dans l’urgence avec une feuille de route approximative. La crise provoquée par ce type de changement doit permettre d’innover et non de régresser et présuppose donc un apprentissage collectif.
Le coaching peut être un accompagnement à cette problématique
1. Kate MORGAN (01/07/2021), « The great Resination : how employers drove workers to quit » in BBC Worklife
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